Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Altawabi's blog II
7 octobre 2008

'Pourrais vous raconter quoi ? - Qu'hier matin

'Pourrais vous raconter quoi ?

- Qu'hier matin dans le couloir des UFR de Clignancourt, y'avait un type de mon âge avec une barbe, étudiant de philo de la même année que moi, qui faisait la queue devant le secrétariat de géographie, en lisant un bouquin d'Artaud. Pour en finir avec le Jugement de Dieu. Haha.
L'espoir, quoi. Des gens bien dans cette fac, je l'savais !

- Que je ne suis pas loin de croire que mon actuel livre de chevet est absolument génial - ouah, que de grands mots, légère exagération sûrement. Pas que j'le descende particulièrement vite pourtant, non, je lis toujours aussi lentement ; mais ça me retourne, un peu. A tel point qu'après avoir lu quelques pages, je lève les yeux, non pas parce que le texte m'emmerde, mais parce qu'il m'évoque tellement de choses que ça se bouscule dans ma tête, toutes sortes d'images, des visages, des souvenirs plus ou moins lointains qui se déversent, une foule désordonnée qui vous piétine le cerveau ; et parfois comme quelque chose au bord de s'effondrer, l'envie de fermer les yeux  et de serrer les dents pour ne plus voir tout ça, chasser, faire le vide ; l'impression que si ça reste une seconde de plus on ne pourra plus tenir sur ses pieds, mais comme si la perte d'équilibre imminente, la chute, le redressement in extremis, cette affaire d'un instant, cela durait pourtant, s'installait sur de longues minutes.
Le bouquin : Louis Calaferte, Septentrion.

- Que je me demande si je vais lire ou non l'Histoire de la folie à l'âge classique de Foucault. Il me fait de l'œil depuis mon étagère, ce petit pavé de cinq-cent cinquante pages. Jamais lu un aussi gros machin de philosophe. Ça me tente franchement. Sérieusement intéressée par le sujet, et puis ça serait en lien avec mon cours de philo générale - que du bonus, apparemment. Mais, ça voudrait dire, un petit bout de temps sans lire de littérature. Idée qui me déplaît. M'inquiète, presque.  A voir.

- Qu'encore une fois, je parle de tout par ici sauf de l'important, sauf de certaines choses dont j'aimerais parler depuis des jours, des semaines peut-être déjà. L'écriture. L'estime de soi. L'impression d'avoir grandi dans un mensonge, un mensonge rassurant. Et pourtant, pas de Dieu. Me demande si ce sentiment est partagé par quelques uns, par beaucoup, par tout le monde. Me souviens que quand j'étais gamine, je me disais que ce qui nous arrivait de réel dans la vie, ça n'avait finalement pas d'importance, puisqu'il y avait l'imagination, puisqu'avec elle on pouvait vivre tout ce qu'on voulait. Et l'imagination, en ce temps là, ça n'avait rien à voir avec quoi que ce soit d'artistique, de créatif, rien à voir avec l'originalité. Pas de pression, pas de regard. Ça n'avait à voir qu'avec le bonheur. Oui, c'était vraiment chouette, la vie par procuration, à travers les peluches et les playmobils, les longues lettres qu'on écrivait au cousines pour leur raconter tout ce qui se passait dans ce fameux ranch caché sous mon lit, auquel je ne touchais pourtant jamais. La littérature jeunesse, aussi. Je crois que j'ai arrêté de lire quand les livres ont arrêté de me raconter ce que j'avais envie de vivre, ne m'ont plus permis de vivre à travers eux, d'y trouver la vie que la réalité ne me donnait pas.
Aujourd'hui, les livres qui me marquent sont ceux qui me racontent ce que j'ai peur de vivre. Je veux dire, qui me terrifie. Ce dont on m'a toujours dit, ça n'arrive qu'aux autres. Ce qui m'est un peu arrivé ou pas du tout, qui me recroqueville comme un fœtus le soir sous ma couverture, un oreiller étouffé entre mes bras. Qui me fait accrocher au dessus de mon lit un petit poème d'Aragon qui parle d'amour, comme dans l'espoir que ces mots me protègent. Qui me fait sortir comme malgré moi des pièces de mon porte-monnaie quand un type demande de l'aide dans le métro, même si je sais très bien que son discours attrape-pitié est à moitié faux - et alors ? Il ne faudrait offrir son aide qu'à ceux qui savent exprimer leur souffrance avec habileté et retenue ? Il faudrait que ça se mérite, l'aide, quand on est dans la merde ?
L'imagination m'a abandonnée. J'ai eu beau lutter, je me suis lassée de vivre dans son cercle. Un jour est arrivé où je n'y arrivais plus. Comme un vieillard n'arrive plus à bander. Mes jouets petit à petit ont disparu de ma chambre. Quand j'y pense, elle est tellement vide, aujourd'hui. Je me suis tournée, souriante, vers la réalité. Bras ouverts. En sont revenus avec quelques bleus, comme chacun sait. Ne pensais pas que la réalité avait une surface si rugueuse, si pleine d'aspérités. Ce n'est pas qu'il ne m'est rien arrivé de bon, oh non, pas du tout. C'est simplement que la réalité n'a pas la même texture que l'imagination. Elle est d'une autre nature. Comme quelque chose de plus sec. Ce qui y arrive de bon n'y arrive pas de la même façon que dans les histoires que se racontent les enfants. D'une façon plus complexe, moins uniforme. Qui demande à être apprivoisée, et c'est un travail qui n'est pas toujours simple.

(Et comme je rate toujours la fin de mes articles, celui-ci n'en aura pas !)
 

Publicité
Publicité
Commentaires
Altawabi's blog II
  • Naissance d'un nouveau blog, d'un nouveau chez-moi. D'un nouveau moi ? Non. Jamais. Je suis ce que je suis et ce que je traine derrière moi, hein. Comme toujours. Ça, ça n'a pas changé, et ça ne changera pas. Non, c'est juste que... je déménage.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Derniers commentaires
Archives
Publicité