(Vide.)

J'aime bien la philo, pourtant.

Mais ça me fait peur, merde. Je n'y arriverai jamais. Jamais, jamais, jamais. Je n'ai ni l'envie, ni la patience, ni la force de concentration nécessaire pour ingurgiter toute cette culture, la comprendre, être capable de la réutiliser à bon escient. Je suis sûre qu'il est possible de rendre l'exercice de la dissertation véritablement intelligent, et même profitable pour la vie de tous les jours, mais c'est un tour de force qui me semble tellement inaccessible !

Je n'arrive pas à tirer quoi que ce soit de l'Analytique du beau, j'ai même l'impression insupportable que Kant se plante d'un bout à l'autre ; je n'arrive pas à comprendre un traitre mot de Pline sans passer quatre heures courbée sur un énorme dictionnaire, les sourcils douloureusement froncés à retourner les mots et les déclinaisons dans ma tête. Tout ça pour quoi ?

Et puis surtout, il y a l'Avenir. Ce connard qui me gâche la vie. Oui, bien sûr, la philosophie m'aura de toute façon apporté quelque chose quoi qu'il arrive.
Mais je me contrefous de savoir plein de choses, d'avoir toute cette culture à étaler comme de la confiture sur des tartines, la philo, je lui demande juste de m'aider à vivre. De m'ouvrir des perspectives, je ne sais pas.
Je ne voudrais pas qu'elle m'accable l'esprit de toutes ces spéculations difficiles, je voudrais qu'elle m'éclaire, m'illumine, me fasse du bien par des mots clairs et apaisants. C'est ce qu'elle faisait, avant.

Avant, quand je regardais mes jolis bouquins de Platon alignés dans mon étagère, je souriais, et je pouvais m'endormir tranquille.
Il y a bien encore de voir monsieur V. qui me donne envie de continuer, avec cet objectif en tête : faire un jour ce qu'il fait, moi aussi.
Mais je n'y arriverai jamais, jamais.
C'est devenu trop difficile, et j'aurai ramé pendant cinq ans avec pour seul réconfort cet objectif en tête, que je n'aurai pas atteint.